LES DÉPARTEMENTS |
Présidial : Nom donné à des tribunaux civils et criminels jugeant en première instance. Créés en 1551, ils furent supprimés en 1792 (ils ne jugeaient au criminel que certaines infractions. | Baillage : tribunal jugeant sous la présidence d'un Bailli (officier de robe ou d'épée qui rendait la justice au nom du roi ou d'un seigneur). | Pays d'élection : étaient directement imposés à la taille et aux aides. La gestion de ces taxes et leur contentieux appartenaient aux officiers royaux appelés "élus". | Généralités : circonscriptions qui s'appliquaient aux pays d'élections. On trouvait cinq trésoriers généraux. Elles étaient sous la présidence d'un Intendant qui avait des pouvoirs très étendus car il était Intendant de Police, de justice, de finance. |
Inutile de vous dire le mécontentement de certains Artensiens quand ils se virent rattachés à ce que l'on appelait l'Auvergne de la rave et du seigle en opposition à l'Auvergne du blé, et de la
vigne qu'ils jugeaient, évidemment à tort, infiniment plus prestigieux.
L'Artense (pour les plus jeunes) est une zone assez imprécise comprise entre la Dordogne et la Rhue et terminée au nord par les plateaux de la Tour d'Auvergne et de Saint-Genès.
Dans ma jeunesse, je me souviens des gens de Champs, sachant que nous habitions Vebret, disant : "S'ez d'allaï l'aïgua” (vous êtes de l'autre côté de l'eau). C'était bien à leurs yeux une
frontière et ils nous le faisaient bien sentir.
Il est vrai que la commune de Champs, malgré l'honneur imprévu qui lui avait été fait d'être choisie comme chef-lieu de canton en 1790, pétitionnait encore trois ans plus tard pour être rattachée
au Puy-de-Dôme. Cette démarche étant surtout dictée par la crainte, hélas fondée, d'une imposition plus importante de la Haute-Auvergne (héritage du mode d'imposition de l'ancien régime qui dura
quelques années après la révolution).
Les limites du Cantal furent, donc, fixées. Elles correspondaient, sur près des trois quarts, aux limites des circonscriptions de l'Ancien Régime, formant un pays homogène marquée par une réalité
géographique, celle du Massif Cantalien, le plus vaste édifice volcanique d'Europe.
Emile DUCLAUX, élève et successeur de Pasteur, né à Aurillac en 1840, évoquait ainsi le département du Cantal : "une roue sans jante posée sur un baquet". Le Plomb du Cantal et les sommets
voisins forment le moyeu et les rivières (Rhue, Sumène, Auze, Maronne, Jordanne, Cère et Allagnon) forment les rayons.
Croyez-vous que tout était réglé ? C'était sans compter sur les ambitions des Limousins du canton d'Ussel qui, une centaine d’années plus tard, eurent le front d'intenter une action pour qu'une
partie du canton de Saignes, dont Vebret, soit rattachée à la Corrèze. Mal leur en prit car ils se virent répondre qu'au contraire, c’est Bort qui devrait être rattaché au Cantal. Les choses sont
restées en l'état.
Pour ce qui est du nom, peu de problèmes se sont posés. Notre département a pris celui de son sommet le plus haut : Plomb du Cantal et les habitants
ne virent aucun inconvénient à laisser entendre, par le nom de leur département, qu'ils produisaient de l'excellent fromage.
Il n'en fut pas de même pour nos voisins du nord, ceux de la basse Auvergne. Ce qualificatif de basse était pour certains péjoratif, notamment pour
les Riomois, rivaux des Clermontois, qui savaient tous par coeur ces deux vers :
"RIOM, chef glorieux de cette terre grasse
Que l'on nomme Limagne, au lieu d'Auvergne Basse".
Pour son appellation, plusieurs noms furent avancés dont celui de "Mont-D'Or” qui désignait à l'époque le sommet le plus élevé du Massif Central (aujourd'hui le Sancy). Un député
clermontois proposa Puy-de-Dôme avec cette argumentation :
- "Je préfère cette seconde dénomination à la première afin d'éviter que l'on ne conçoive l'idée de richesse en prononçant son nom, et pour prouver qu'il est plus facile d'y peser l'air que les
écus" (faisant ainsi allusion à la fameuse expérience de Blaise Pascal).
Revenons au Cantal. Un sujet très épineux était la désignation du chef-lieu. Les ambitions opposées de Saint-Flour et d'Aurillac,
s'étant déjà manifestées pour le choix du chef-lieu de baillage principal pour les élections aux Etats Généraux, ressurgirent de plus belle, si bien qu'il fut décidé que le chef-lieu serait
alternativement à l'une et à l'autre de ces villes, Ce fut Saint-Flour qui inaugura ce dispositif.
Mais c'était sans compter sur l'administration qui accumulant (déjà) les paperasses et les archives de tous ordres, il fut difficile, compte tenu des moyens de transports de l'époque d'assurer
normalement cette navette (ce ne fut, évidemment, pas la seule cause, car paraît-il, Saint-Flour aurait fait quelques erreurs de gestion).
Finalement, Aurillac devint le chef-lieu, Saint-Flour conservant l'évêché qui date du XIV° siècle.
Au moment où fut établi le Calendrier Républicain, dans lequel le nom des mois était associé à la météorologie ou à la végétation, et les jours de la
semaine portaient des noms de fruits, il ne fut pas question de conserver des noms de ville rappelant la religion ou la féodalité. C'est ainsi que Saint-Flour devint quelques temps Fort-Cantal et
que Vic-en-Carladès devint et resta Vic-Sur-Cère.
Un premier arrêté fixait à trois le nombre des districts (arrondissements actuels) : Saint-Flour, Aurillac et Mauriac. Un quatrième district fut finalement installé à Murat. Il fut supprimé en
1926 et les trois cantons qui le composaient furent rattachés à Saint-Flour.
Le Cantal actuel a trois arrondissements, vingt-six cantons et deux cent soixante deux communes.
L'arrondissement de Mauriac comporte six cantons et cinquante quatre communes :
- Mauriac : 11 Pleaux : 7
- Saignes : 12 Riom-es-Montagnes : 8
- Salers : 12 Champs-sur-Tarentaine : 4
En 1840, Levasseur fit éditer un Atlas des Départements (une reproduction de la carte du Cantal est à la Mairie). Sous sa direction, des petites géographies des départements faisaient partie de
la panoplie des livres donnés aux élèves. Sur celle du Cantal, j'ai relevé que celui-ci avait une superficie de 577 769 hectares, Sa plus grande longueur, de l'extrémité du canton de Champs à
l'extrémité du canton de Montsalvy est de 93 kilomètres. Sa plus grande largeur est d'environ 102 kilomètres du point où il touche la Haute-Loire au point où il touche la Corrèze. Son altitude
moyenne est de 800 mètres.
Au recensement de 1801, il avait 220 304 habitants.
Aujourd'hui, avec ses 160 000 habitants environ, il est moins peuplé qu'en 1750.
Notre bicentenaire ne se porte pas trop mal mais il a besoin de sérieuses améliorations pour faire face à l'évolution du monde moderne. Son réseau de communications indispensable pour permettre l'implantation d'activités nouvelles, ses structures d'accueil pour le tourisme laissent beaucoup à désirer. La taches est lourde pour nos élus.
Souhaitons que le Nord Cantal fasse partie des actions prioritaires.
Jean TOURNADRE.(juillet 1990) |